Je reviens d’une retraite de 7 jours avec Jon Kabat-Zinn et son collègue Saki Santorelli. Ils enseignent la réduction du stress par la pleine conscience (RSPC) pour les professionnels de la santé au Centre Omega, à Rhineback, dans l’état de New York.

Le programme est une version intensive du curriculum RSPC de huit semaines et comprend une retraite silencieuse de 30 heures au milieu de la semaine. Le calendrier était très chargé : tous les jours, nous commencions à 6 h avec 90 minutes de méditation. Puis, nous participions à un atelier ou à une séance de méditation de trois heures avant le dîner, suivi par une autre séance de trois heures. La plupart des journées se terminaient par un autre atelier ou une séance de méditation de deux heures! La journée de retraite silencieuse était la partie de la semaine la plus exigeante – et la plus enrichissante : un total de 9,5 heures étaient consacrées à la pratique, nous avons fait du yoga, des séances de méditation et de la marche. J’étais fatigué, mais me sentais très bien à la fin de cette journée!

Dans l’ensemble, la retraite a été une excellente expérience pour moi. J’ai travaillé de longues et intenses heures dans les semaines la précédant et je me sentais épuisé et vidé émotionnellement. C’était génial de se retrouver à la campagne, d’absorber la paix et le calme, sans avoir à penser à des réunions, à des échéances et à des courriels. Croyez-le ou non, mais j’ai passé 7 jours sans me connecter à l’Internet! Vous ne pouvez pas imaginer l’état d’esprit libre et léger qu’offrent des « vacances de connexion ».

Fait plus important, les nombreuses heures de méditation m’ont permis de reprendre contact avec une version de moi-même plus ouverte, paisible et pleine de compassion, qui se perd parfois dans ma vie professionnelle débordée. Dans le silence de la méditation, j’ai exposé les habitudes mentales qui modifient subtilement mes interactions avec le monde. Cette exposition m’a permis de voir au travers des distorsions qui font habituellement partie de mon expérience et de prendre conscience de vérités concernant les choses qui m’importent vraiment et la manière d’avancer dans la vie. Ce n’était pas facile du tout, et je suis content d’avoir pu faire cette expérience en compagnie de 200 autres professionnels de la santé. Les émotions pures qui émergent lors de la pleine conscience contribuent à la formation de liens solides, et j’ai eu la chance de rencontrer des personnes exceptionnelles.

La semaine était aussi excellente en matière de développement professionnel. Jon Kabat-Zinn était très impressionnant. Il possède un robuste intellect, de l’énergie dynamique et un grand sens de la compassion. En plus de mener les ateliers et la méditation, il est resté sur place après chaque séance pour discuter en privé avec les participants et a mangé ses repas aux tables communes. Cet homme ne se repose jamais! Pas mal pour quelqu’un qui a célébré son 69e anniversaire cette semaine-là.

Kabat-Zinn nous a raconté toute l’histoire de la création de la réduction du stress par la pleine conscience; elle est aussi intrigante que son créateur. En tant que jeune professeur de biologie à l’Université du Massachusetts, il a commencé à enseigner la pleine conscience comme deuxième emploi, dans le sous-sol de l’école de médecine. Il souhaitait aider les gens laissés pour compte par le système de santé en leur enseignant la tradition bouddhiste de la pleine conscience, adaptée pour la culture médicale populaire occidentale. Il invitait les médecins à lui recommander leurs patients difficiles à traiter, y compris ceux qui souffraient de dépression, de douleur chronique et d’autres maladies chroniques. Il ne savait pas quoi appeler son programme, alors il a choisi un nom inoffensif et générique : la Clinique du stress. C’était en 1979 – avant l’Internet, avant les téléphones cellulaires, avant les répondeurs, avant même que je sois né!

Les résultats parlaient d’eux-mêmes. Les vies des patients de la Clinique du stress se sont améliorées, et les médecins ont commencé à recommander de plus en plus de patients. Des chercheurs ont commencé à étudier le programme de Kabat-Zinn et à établir une base de preuves solides. La clinique a grandi et le nom RSPC (MBSR en anglais) a été adopté, en mettant l’accent sur le « M » initial. Au cours de la décennie suivante, quelques tendances scientifiques ont accéléré la prise de terrain de la RSPC dans le milieu médical : 1) les communautés médicales et scientifiques ont commencé à reconnaître les graves conséquences du stress sur la santé; 2) l’émergence de la recherche en imagerie cérébrale et la découverte de la neuroplasticité ont permis à Kabat-Zinn et à son équipe de démontrer des changements mesurables dans le cerveau des participants à la RSPC; et 3) plus récemment, des chercheurs en épigénétique ont été en mesure de commencer à découvrir les changements dans l’expression des gènes à la suite de la RSPC. Ce que Kabat-Zinn a créé n’est rien de moins qu’une révolution dans les soins de santé.

Au cœur de la RSPC est la notion que nous pouvons modifier notre rapport à la douleur, qu’elle soit physique ou émotionnelle. Au lieu de nous concentrer sur la recherche de solutions à notre malaise, nous pouvons apprendre en faire un allié, et à s’ouvrir à lui dans le cadre de notre expérience. Cela signifie que, plutôt que de penser à l’inconfort comme un frein à notre qualité de vie, nous l’observons – et nos réactions à lui – avec conscience et en sachant que le confort et l’inconfort sont transitoires. Ce faisant, nous devenons moins attachés à la perfection de chaque petit détail de nos vies.

Cultiver cette relation à notre expérience nécessite une formation en méditation de pleine conscience. Pratiquer la méditation nous aide à prendre notre temps et nous permet de voir comment nos esprits créent des « histoires » de nos expériences, nous empêchant de vivre le moment comme il est. Une partie de ce travail mental est inoffensif, mais une grande partie renforce des attitudes nuisibles envers nous-mêmes, nos corps et nos relations. Apprendre à prêter attention et à cultiver la conscience de cette manière est un outil puissant pour améliorer la santé globale et le bien-être; cela crée un petit espace psychologique dans lequel nous pouvons évaluer nos pulsions momentanées, choisir nos actions et rester en contact avec ce qui compte vraiment pour nous.

Le Center for Mindfulness a récemment obtenu son 20 000e participant, et il y a maintenant plus de 740 programmes de RSPC dans des hôpitaux, des cliniques et des centres de santé à travers le monde. La pleine conscience est actuellement enseignée non seulement dans les milieux de soins de santé, mais aussi dans les programmes de mieux-être, dans les forces armées et dans les programmes de formation pour les athlètes d’élite. Les professionnels de la santé, les enseignants et les médias traditionnels suivent de près la croissance de la RSPC. En fait, au cours de la retraite de la semaine dernière, un photographe du magazine Time était sur place pour prendre des photos pour un reportage à venir sur Jon Kabat-Zinn. Pas mal du tout pour un homme qui a commencé à enseigner la méditation dans le sous-sol d’un hôpital il y a 43 ans!